[Podcast In-Pacte] 8 questions à Jean-François Ponsot pour comprendre la crise économique actuelle
Dernière mise à jour : 7 mars 2021
Préambule : In-Pacte, c'est le podcast du laboratoire Pacte qui donne la parole aux chercheur-es. Chaque épisode est une rencontre avec un-e chercheur-e qui a pris part au séminaire du laboratoire sur "Les conséquences de la crise de la covid". L'objectif de ce podcast bimensuel ? Interroger les chercheur-es sur leurs travaux en moins d'un quart d'heure pour que vous compreniez l'essentiel !
Dans le deuxième épisode de In-Pacte, nous interrogeons Jean-François Ponsot, professeur de sciences économiques à l'Université Grenoble Alpes et chercheur permanent dans l'équipe de recherche Regulations au laboratoire Pacte. Il a mené des travaux sur la crise économique et financière
Retrouvez cette interview produite par le laboratoire Pacte et menée par Emilie Wadelle du studio de production sonore Skadi & Co.
[AUDIO] Écoutez l'interview de Jean-François Ponsot dans le deuxième épisode de In-Pacte, produit par le laboratoire Pacte, réalisée par Émilie Wadelle
Emilie Wadelle - Bonjour Jean-François Ponsot, et merci d'avoir accepté notre invitation ! La crise de la covid a mis en exergue une crise économique et financière. À l'occasion du séminaire de recherche de PACTE, vous parlez d'une crise inédite. En quoi l'est-elle ?
Jean-François Ponsot - Nous avons affaire à une crise qui est tout d'abord brutale, profonde. C'est l'économiste en chef du FMI - le Fond Monétaire International -, Gita Golpinath qui parle de grand confinement pour qualifier cette crise économique. Elle utilise cette expression en référence à la Grande Dépression des années 30. C'est pour bien montrer qu'en fait, depuis un siècle, on n'a pas connu de crise aussi grave. Cette année, par exemple, en France, on aura en 2020 une récession d'au moins 10 %, ce qui n'est jamais arrivé.
Émilie Wadelle - Ça veut dire quoi, avoir une récession de 10% ?
Jean-François Ponsot - Cela veut dire que la création de richesse sur une année a diminué de 10% par rapport à l'année précédente. Il faudra attendre au moins quatre ans pour récupérer ce retard.
Cette crise est effectivement inédite à plusieurs niveaux. Tout d'abord, parce qu'elle est globale. Pour la première fois, on a une crise économique qui concerne tous les pays de la planète, alors que d'habitude, y a toujours quelques pays ici ou là, ou des zones qui sont préservées. Elle est inédite aussi, parce que c'est une crise qui est à la fois exogène, c'est à dire qu'elle vient de l'extérieur d'un choc qui n'était pas prévu, en tout cas pas anticipé. Endogène - Ça signifie que c'est aussi les décisions qui sont prises à l'intérieur de la crise au moment de la crise qui vont entraîner cette crise. Et typiquement, le confinement, qui a été effectivement une décision difficile, a accru le poids de la crise parce qu'il fallait faire le choix entre la santé et l'économie.
La pandémie nous est tombée dessus comme ça et tout d'un coup, elle transforme l'économie en profondeur.
Mais cette crise, elle est aussi endogène.
Et ça, c'est quelque chose d'assez étonnant d'avoir à la fois exogène et endogène.
Au delà de cette question, la crise est inédite parce que c'est aussi une crise qui est à la fois une crise d'offre et une crise de demande. D'habitude, c'est soit l'un, soit l'autre. Effectivement, du jour au lendemain, on arrête la production. Donc plus d'offre. Crise de la demande parce que du jour au lendemain, des secteurs n'ont plus de revenus et ne peuvent plus dépenser. Et enfin, dernier caractère inédit, c'est le côté pragmatique des décideurs politiques. Les gouvernements ont activé des politiques budgétaires hypers expansives qui ont fait voler en éclats tous les dogmes qu'on avait jusque là. Et puis, les banques centrales ont décidé de relancer à nouveau une vague d'expansion monétaire colossale, alors qu'il était plutôt question de ralentir l'expansion monétaire engagée depuis dix ans.