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[Podcast In-Pacte] Monika Steffen, comparaisons de gestion de la covid entre la France et le Japon

Préambule : In-Pacte, c'est le podcast du laboratoire Pacte qui donne la parole aux chercheur-es. Chaque épisode est une rencontre avec un-e chercheur-e qui a pris part au séminaire du laboratoire sur "Les conséquences de la crise de la covid". L'objectif de ce podcast bimensuel ? Interroger les chercheur-es sur leurs travaux en moins d'un quart d'heure pour que vous compreniez l'essentiel !



Dans le deuxième épisode de In-Pacte, nous interrogeons Monika Steffen, chercheuse affiliée à PACTE, ex-directrice de recherche émérite du CNRS. Dans le cadre de la crise sanitaire actuelle elle a été amené à comparer les politiques de lutte contre la covid au niveau international et plus particulièrement la réponse japonaise à cette crise.


Retrouvez cette interview produite par le laboratoire Pacte et menée par Emilie Wadelle du studio de production sonore Skadi & Co.




Emilie Wadelle - Bonjour Monika Steffen. Vous avez aussi mené une des premières analyses sur le système des politiques de santé en France sur le sida. C'est très peu commun pour une chercheuse de pouvoir vivre et d'étudier deux pandémies dans sa carrière. Est-ce que vous pouvez nous raconter quelles sont les différences et les rapprochements entre ces deux maladies?


Monika Steffen - C'est très important de revenir sur le sida parce qu'il y avait des leçons à prendre et qu'on n'a peut-être pas appris. D'abord, le sida a frappé le gouvernement comme la covid, totalement non préparé dans le monde entier. Il fallait tout inventer et on a eu un peu le même problème de manque…On manquait à l'époque de tests, de médicaments qu'on n'a eu que 15 ans plus tard. On n'a toujours pas de vaccin.

La covid, maintenant, on a un vaccin, mais on n'a toujours pas de médicament efficace. On manquait du matériel, à l'époque, on manquait des préservatifs qui avaient mauvaise presse. On ne produisait plus, il n'y avait pas de stock, on n'avait pas de masques. Il y a eu la judiciarisation avec le scandale du sang contaminé. Là, on est déjà en cours des procédures à cause des masques. Alors, les différences sont nettes. Le sida était une maladie mortelle, mais seulement transmissible, pas infectieuse. Donc, elle restait plus limitée dans les groupes particulièrement à risque. Et ça a amené une politique de lutte contre les discriminations,donc, une grande politique de solidarité qu'on a mis aussi en œuvre avec la covid : aide économique aux gens parce que cette maladie infectieuse met à l'arrêt l'économie et donc il faut soutenir les gens pour survivre. Si je devrais résumer un peu dans les deux cas, on a fait un gros effort de solidarité, de soutien aux victimes financièrement, moralement, socialement, etc. C'était nécessaire et un grand effort scientifique et que la solution pour le sida était scientifique et la solution pour la covid aussi. Donc, bravo le vaccin!


Emilie Wadelle - Vous avez coécrit un article concernant la covid au Japon. Alors d'abord, quelles sont les particularités du système de santé dans ce pays?


Monika Steffen - Le Japon et la France ont un système de santé à la fois un peu semblable, universaliste, avec une assurance maladie qui couvre tout le monde mais en même temps, ils sont assez différents dans la gouvernance du système, dans son organisation et aussi dans la façon dans laquelle les gens et les professionnels l'utilisent. Trois points sur les dépenses.

  1. Le Japon était traditionnellement avec des dépenses de santé très bas et il a augmenté ces dernières années de...beaucoup. C'est peut-être à cause du vieillissement de la population, peut-être à cause du progrès technique. En tout cas, jusqu'à 2000, il était autour de 7% du produit intérieur brut pour les dépenses de santé. C'était juste le moyen OCDE. Et maintenant, ils sont à 11% - c'est très proche et presque similaire à la France.

  2. L'assurance maladie, elle, a beaucoup d'acteurs au Japon, il y a des assurances, mais il y a aussi des entreprises. Et pour les gens qui ne sont pas dans les assurances maladie, les grandes entreprises sont dans les assurances territoriales comme en Allemagne. On se fait beaucoup de organismes différentes, alors qu'en France, on a un système centralisé, une seule unique assurance maladie et donc la gouvernance elle est plus multiples. En fait, plus de compromis. Au Japon, l'Etat, au Japon, il fixe les tarifs, remémoration les médecins, les hôpitaux et il n'est pas possible de dépasser les honoraires sont interdits. C'est une grande différence avec la France et le système de soins et de santé publique est relativement décentralisé. Ce sont Les 47 préfectures, c'est un pôle intermédiaire entre les régions et les départements français et les milliers de municipalités qui gèrent l'offre de soins et les actions de santé publique.

  3. Le dernier, troisième élément à rajouter, au Japon, on paye toujours 30% de dépenses médicales soi-même. Il n'y a pas de mutuelles ou d'organismes complémentaires ou de façon très marginale. Vous pouvez souscrire dans votre assurance automobile une petite partie de santé complémentaire, mais c'est très peu fait. Donc, les Japonais, en principe, payent 30% de leurs dépenses, sauf si c'est de très grosses dépenses et ou des gens très pauvres.

Et le résultat , c'est qu'ils ont beaucoup plus la prévention dans le