[🎙In-Pacte] 5 questions à Stéphane Cartier - Risques naturels et covid : similitudes & différences.
Dans le quatrième épisode de la saison 2 du podcast In-Pacte, nous interrogeons Stéphane Cartier, sociologue au CNRS et membre de l'équipe "Environnement" au laboratoire PACTE. Dans le cadre de la crise sanitaire actuelle, son travail est d'analyser l'adaptation des populations et des institutions aux contraintes écologiques.
Retrouvez cette interview produite par le laboratoire Pacte et menée par Emilie Wadelle du studio de production sonore Skadi & Co.
Émilie Wadelle - Bonjour Stéphane Cartier. Vous travaillez sur les politiques publiques de réduction des vulnérabilités environnementales. Votre travail, si on le résume, c'est d'analyser l'adaptation des populations et des institutions aux contraintes écologiques, en particulier face aux risques d'inondations et aux risques sismiques. Par le biais de vos recherches, vous avez montré que la situation inhérente à la crise de la covid, elle trouve des similitudes dans la gestion des risques naturels. Pour commencer, est-ce-que vous pouvez nous donner des exemples de similitudes entre la crise de la covid et ces risques naturels ?
Stéphane Cartier - Dans la crise de la covid comme dans la question des risques naturels, on a une difficulté d'un manque de contrôle social de la domestication de la nature. Alors qu'on croyait être dans une civilisation qui arrivait à avoir une très bonne capacité sanitaire et une très bonne maîtrise de soi, on s'aperçoit que la maîtrise de la nature est difficile. Cette crise comme les risques naturels nous oblige à nous poser à nouveau des questions sur la manière de vivre au grand air, sur notre relation à la nature. Désormais, nos sorties sont régis par des règles. Ces règles ont été définies collectivement. Finalement, la question qu'on se pose sur certains risques naturels d'un coup, elle est à vif, et elle contraint toute la population : toute la société se retrouve dans cette contrainte du confinement au nom de “on ne maîtrise pas notre relation à la nature”. D'autant plus que le vecteur de propagation du virus, il est dans l'interdépendance humaine et dans le fait de se transmettre le virus.
Émilie Wadelle - Quelles sont les différences entre les mécanismes qui sont produits par cette crise de la covid et par la gestion des risques naturels?
Stéphane Cartier - On a une différence dans le sens où, cette fois, comme avec la question du changement climatique, on est à un niveau d'approche planétaire. Toutes les sociétés sont perturbées. Se repose donc immédiatement la question de la frontière et de la réduction des échanges, non seulement des marchandises, mais aussi pour les personnes. Dans une économie qui était très orientée sur le tourisme, les échanges internationaux, le commerce et la diplomatie, on voit bien qu'il y a une rupture très forte, ce qui met aussi en péril les capacités à porter secours.
Par exemple, s'il y en a une famine : on pouvait envoyer avant la crise sanitaire des forces humaines et des stocks. Là, on se trouve dans un ordre qui est de séparer les gens. C'est une des grandes différences. C'est rare dans les risques naturels, qu'on soit obligé de vraiment de séparer les gens pendant un an. Au contraire, on essaye de garder de la solidarité par le renforcement de capacités pour aider les gens localement. Depuis mars 2020, l'autre est devenu celui dont il faut se protéger.
Dans les risques naturels, il y a aussi la prévention face aux risques - qu'on peut définir par "les aléas" : c'est le fait de pouvoir définir à l'avance des événements imprévisibles, comme la rupture de faille qui va provoquer un séisme, par exemple. Mais quels sont les aléas de la vulnérabilité dans la crise de la covid ? Il est marqué par le nombre d'interactions qu'il va y avoir avec l'autre et puis ce n'est pas mon ressort, mais les transformations du virus lui-même. Avec la covid, la vulnérabilité principale, c'est la relation à l'autre qui va contre l'organisation spontanée par rapport aux mécanismes que l'on retrouve pour les risques naturels.
Émilie Wadelle - Et justement, est-ce-qu'on a déjà, au travers de vos recherches, une idée de comment est ce qu'on peut pallier à cette vulnérabilité qui, finalement, est le contact avec l'autre, alors que c'est vraiment à l'encontre de ce qui fait notre société ?
Stéphane Cartier - Il y a un point qui est intéressant à signaler, c'est la question de l'interface entre le virus, les humains, les interdépendances naturelles, les animaux, les transformations des biotopes. On a plusieurs pistes qui identifient comment la propagation et la mutation des virus peut être liée à des modifications des biotopes. Cela va nous amener à des questions très dures, très locales, très familial. Comment réagira t-on si à un moment on s'aperçoit que les chats domestiques sont le réservoir positif du covid ? Qu'ils le transm